« Pardon ?

Se trouvant devant elle le pire homme que la terre ne puisse connaitre. Son sourire narquois, ses mains dans les poches, son éternel air hautain. Izaya venait de remettre à Yuuki une clé USB qu'elle détailla rapidement. Rien de bien spécial. Son ordinateur était chez elle, impossible de savoir le contenue pour le moment. Par contre, elle ne comprenait pas pourquoi il l'a confiait à elle. Il savait parfaitement qu'elle était de nature curieuse, presque comme une maladie. Pourquoi il la confiait à elle qui pourtant, n'était pas la première personne dans son répertoire ? Elle ne comprenait pas bien la situation et ne devait pas compter sur Izaya pour en savoir plus. D'un ton taquin et joueur, il lui sortit un magnifique "Je ne sais rien ! ~". Non vraiment, il se fichait d'elle. Il sortit les mains de ses poches et haussa les épaules nonchalamment. Yu' n'était déjà pas d'humeur, si en plus il venait pour s'amuser d'elle, il n'avait vraiment pas peur pour sa vie. Il n'empêche, c'était la première fois qu'il lui demandait quelque chose. Conscience oblige, elle rangea dans sa poche la petite clé. Lâchant un soupir las, elle lança un regard accusateur à l'homme qui n'avait toujours pas effacé son sourire. Ce dernier rit comme un gamin satisfait et partit en courant. Surement avait-il autre chose à faire. Yuuki leva les yeux au ciel, se demandant bien pourquoi le sort s'acharnait sur elle. Qu'avait-elle fait de mal dans sa vie ?... Bon d'accord, mauvaise question : qu'avait-il fait au ciel pour mériter cela ? Rien, et voilà ce qu'elle récolte. Puisqu'elle n'avait plus rien à faire ici, autant partir, elle ne perdrait pas son temps au moins.

Unique tout de même, ce qu'il lui avait donné. Une clé USB... C'était bien tentant de voir ce qu'il y avait à l'intérieur.... Malheureusement, en plein milieu d'Ikebukuro, la tâche serait compliqué. Izaya était un informateur hors-pair, tout comme elle. S'il avait mit quelque chose dedans, ce n'était pas pour rien. Donc, aller dans un cyber-café et montrer en même temps aux autre personnes du quartier ce qu'il y avait dedans était une mauvaise idée. Retourner chez elle aussi : une fois installée dans son loft, impossible d'y sortir, sauf en cas d'extrême urgence. Une main dans la poche où se trouvait la petite chose, Yuuki traversa un passage piéton près du restaurant de Sushi russe, l'air penseur. Simon la réveilla en lui tendant un prospectus, comme si de rien n'était. Un petit sourire et deux minutes plus tard, elle se trouvait une rue plus loin. Simon était gentil, mais pouvait faire peur. Elle s'adossa à un mur, reprit la clé et l'oberva encore. Elle n'avait rien de spécial, vu comme ça.

Rangeant le petit appareil, elle se remit à marcher sans vraiment savoir où elle allait. Le quartier des restaurant et des boutiques était pourtant remplit d'informations croustillantes à se mettre sous la dent, mais la clé l'intriguait beaucoup. Beaucoup trop. Le vent souffla, souleva légèrement la jupe plissée de la demoiselle et, comme si une mauvaise chose était en train de se produire, elle eut des sueurs froides. Que se passait-il ? Habituellement, elle n'avait pas si froid que ça, elle supportait très bien ce climat. Alors pourquoi d'un seul coup, elle avait envie de courir très loin ? Son imagination ? Peut-être. Elle ne prit pas la peine de se retourner, puisqu'elle était en ville, autant en profiter pour faire les magasins... Ou tout simplement se changer les idées.

Presque instantanément, Yuuki arriva dans un magasin de chaussures. Finalement, le pressentiment l'avait rattrapé. Elle avait l'impression d'être suivie, et ça ne lui plaisait pas. Pourtant, avant la rencontre avec Izaya, tout allait bien, elle se sentait libre. Maintenant, c'était comme si elle avait quelque sur le dos, en train de l'espionner dans ses faits et gestes... Non, vraiment, il fallait qu'elle se ressaisisse, ou alors elle était bonne pour l'hôpital psychiatrique. Un vendeur se présenta à elle, souriant. Il devait se comportait comme ça de la même manière, avec tous ses clients, ou plutôt toutes ses clientes. Une goutte derrière la tête, elle se força à étirer ses lèvres tel un sourire naturel, mais ce n'était pas gagné d'avance. Tournant sa tête de gauche à droite -très discrètement- elle jeta un coup d'oeil à une nouveauté, tout en gardant l'esprit grand ouvert au cas ou...

Rusée comme elle est, cela ne devrait pas être difficile de voir si quelqu'un la suivait réellement. Est-ce que la fac lui aurait bousillé le cerveau ? Est-ce que c'est le manque d'informations en ce moment qui lui donne ce genre d'impressions ? Ou était-ce parce qu'elle n'avait plus ses jouets, tous partit en vacances ? Son organisme a peut-être eu du mal à croire qu'Izaya lui ai demandé quelque chose. Alors qu'elle demandait au vendeur la taille au dessus, elle regarda dans les alentours, voir s'il n'y avait pas quelqu'un d'autre. Dans la boutique, ils étaient six au total, en la comptant elle. Trois touristes qui venaient prendre en photos les chaussures -comme s'ils n'en avait jamais vu des pareils dans leur misérable vie- et trois acheteurs potentiels, dont elle. Les touristes n'avaient pas l'air de s'intéresser à Yuuki et les deux autres femmes avec leurs talons aiguilles de dix centimètres avaient plus l'air ravie de s'acheter une énième paire de chaussures à plus de cent mille yens la chaussure.

Irritée par son angoisse perpétuel et de ne pas savoir si quelqu'un l'observait ou non, elle prit les chaussures sans même les essayer, quitta le magasin d'un air rageur et serra très fort la clé dans sa main. Ce périphérique aussi commençait à lui casser les pieds. C'était trop intriguant, elle voulait savoir, elle avait besoin de savoir ce qu'il y avait dedans. Soudain, une main se posa sur son épaule gauche et elle sursauta. En se retournant, elle ne vit qu'un petit couple de français -un blond aux yeux bleu et une brune au yeux marron- avec un appareil photo. Ils n'avaient pas l'air de parler le japonais du coup, Yuuki se creusa les méninges pour retrouver son dialecte français. Après trois minutes de discussion, elle finit par comprendre qu'ils voulaient aller au Sunshine. Gentille comme elle est, elle leur indiqua le chemin et soupira de soulagement. Si un simple pressentiment commençait à lui faire perdre la mémoire, elle allait réellement finir dans un hôpital ou retrouver morte dans la baie de Tokyo.

Soulagée, elle reprit sa route vers une autre boutique, sac en main. Mais une fois encore, au croisement d'un restaurant français et d'un fast-food, elle eut des sueurs froides. Pas de panique.... Elle savait se défendre... Se posant dans le restaurant français, elle sortit la clé et l'observa encore. A bien y réfléchir, c'est depuis qu'elle l'avait sur elle que l'étudiante était angoissée. Izaya lui aurait encore donné quelque chose de louche ? Fort probable. Venant de lui, ça ne l'étonnait pas, mais de là à ce qu'il mette en place un jeu dans lequel elle serait la victime, ça l'étonnait un peu plus. N'avait-elle donc pas fait ce qu'il voulait ? Prendre la clé et basta. Lâchant un autre soupir, une serveuse vint à sa rencontre, lui demandant dans un japonais avec un fort accent français ce qu'elle désirait. Rapidement, le cerveau se mit en marche et la bouche sortit un simple "plat de ravioles au saumon poché". Dix minutes plus tard, elle fut servit. Et trente minutes plus tard, elle sortit du restaurant. La journée avait bien avancé....

Enfin, elle se sentit plus légère. C'était à peine si elle pensait encore à la clé. Oui enfin, elle y pensait toujours, c'est pourquoi elle avait décidé de se rendre chez elle, malgré le soleil encore assez haut dans le ciel. Pas de chance, de là où elle était, le chemin prendrait bien une heure voir deux. C'était l'inconvénient d'habitée tout au bout d'Ikebukuro Est alors qu'on est à la porte Ouest. La circulation se faisait déjà plus dense, ça prendrait moins de temps d'y aller à pied. Tant pis, elle n'avait pas le choix. Peut-être aurait-elle la paix jusque là... Peut-être....»